Art et Culture

Financement, professionnalisation et coordination sont indispensables pour une industrie cinématographique africaine créatrice d’emploi (experts)

Dpress

Des universitaires et professionnels de la formation aux métiers du cinéma en Afrique ont souligné, lundi à Rabat, la nécessité de réunir les conditions d’émergence d’une industrie cinématographique africaine développée et créatrice d’emplois pour les jeunes du continent.

Ces conditions se rapportent notamment au financement, à la professionnalisation des filières et à la coordination entre les différents intervenants dans le but d’élaborer une vision intégrée pour le développement du système de formation, ont plaidé ces experts réunis au cinéma Renaissance à l’occasion d’une table ronde sur « Éducation et formation aux métiers du cinéma: quelles filières et quels débouchés sur le continent ? », dans le cadre de la première édition de ROOTS Rabat « Les Journées du cinéma panafricain ».

Évoquant la question des débouchés, Frédéric Kaboré, directeur de l’Institut supérieur de l’image et du son (ISIS) de Ouagadougou au Burkina Faso a relevé que dans son pays, les lauréats des établissements de formation au 7ème art « rencontrent encore de nos jours plus de difficultés pour accéder au marché du travail que leurs confrères issus d’autres instituts et universités ».

« Parmi les candidats au concours d’entrée, il y en a ceux qui viennent juste par hasard, pour tenter leur chance. Ceux parmi eux qui sont pris de passion pour le domaine restent et persévèrent, mais à leur sortie de l’institut, les débouchés sont limités: ils sont majoritairement embauchés par les chaînes de télévision, en particulier pour les séries, plus que par le secteur du cinéma », a noté M. Kaboré, également docteur en sémiotique du cinéma, soulignant l’importance qu’un étudiant ait une « interdisciplinarité » et une « bonne maîtrise de tous les ingrédients de fabrication d’un film » pour augmenter ses chances de décrocher un emploi.

S’attardant sur le cas du Maroc, Ahmed Belkhayat, directeur général de l’École supérieure des arts visuels (ISAV) de Marrakech, a considéré que « la question des débouchés est le dernier souci des écoles de formation, parce que dans le domaine du cinéma et de l’audiovisuel, tout le monde est demandeur: chaînes de télévision, entreprises, festivals, etc ».

Après avoir signalé « l’absence des bases d’une industrie cinématographique et créative en bonne et due forme », M. Belkhayat a mis en exergue l’importance du rôle joué par les écoles africaines de cinéma, qui ont été créées il y a à peine une décennie pour répondre à un vrai besoin en compétences en 7ème art à l’échelle du continent, et qui ont aujourd’hui « atteint un certain degré de maturité » leur permettant de contribuer au développement et à la professionnalisation du secteur.

De son côté, Mamadou Sellou Diallo, directeur du département cinéma à l’université Gaston Berger Saint-Louis au Sénégal et réalisateur de documentaires, a regretté l’absence d’une culture cinématographique dans les sociétés africaines. « On n’a pas formé nos publics à l’importance de la culture dans la vie de société. Par exemple, beaucoup de nos étudiants n’ont malheureusement jamais mis les pieds dans un théâtre ou dans une salle de cinéma », a-t-il déploré.

En matière de formation aux métiers du cinéma, la dimension théorique est inséparable de celles pratique et esthétique et la réussite dans ce domaine est tributaire de la capacité des étudiants à combiner et s’approprier ces trois prérequis, a insisté l’universitaire, soulignant que l’essor du numérique a fait apparaître une nouvelle génération d’étudiants en cinéma et a ouvert de plus amples perspectives devant elle.

Présentant l’expérience de l’Institut supérieur d’art dramatique et d’animation culturelle (ISADAC) de Rabat, sa directrice Latefa Ahrare a indiqué que depuis le concours d’accès jusqu’à l’obtention du diplôme, l’institut veille à cultiver chez ses étudiants une palette de savoirs et de savoir-faire complémentaires (compétences corporelles, vocales et esthétiques, prise de parole, sensibilité artistique, philosophie et histoire de l’art, culture générale…) qui seront décisives dans la réussite de leur carrière professionnelle.

Grâce à cette offre de formation pointue et multidisciplinaire, l’ISADAC a donné naissance à de grands noms dans les domaines de la comédie, l’animation culturelle, la réalisation, la scénographie et autres, qui ont grandement enrichi le champ culturel et artistique national.

Organisée du 12 au 16 mars à l’initiative de la Fondation Hiba et avec le soutien du ministère de la Jeunesse, de la Culture et de la Communication, la première édition de ROOTS Rabat « Les Journées du cinéma panafricain » vise à promouvoir la création de synergies et la coopération Sud-sud en vue de pérenniser l’industrie cinématographique africaine.

L’événement, qui se déroule au cinéma Renaissance- café La Scène ainsi que dans d’autres lieux de la capitale, propose un programme scientifique composé de tables rondes thématiques, de masterclasses techniques et d’ateliers de travail, outre un programme artistique qui comprend une série de projections de long-métrages et de court-métrages africains ouvertes au public. Un autre programme est dédié à une délégation de professionnels vise la mise en réseau des différents acteurs de la chaîne de valeur cinématographique africaine et la construction de partenariats durables avec les partenaires marocains.

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