BM-Maroc : l’écart des prix entre l’agriculteur et l’assiette est injustifié
Dpress
La Banque mondiale (BM) a revu à la baisse ses prévisions de croissance économique en 2023 pour le Maroc, mais s’attend à ce qu’elle s’accélère pour atteindre 3,1 % en 2023 (contre 3,5 % avancé en janvier dernier), grâce à la relance du secteur agricole. La BM avait prévu une accélération de la croissance à 3 % en 2023, avec l’hypothèse d’un retour à une production céréalière moyenne.
Ces prévisions vues et revues restent, cependant, nettement supérieures à la croissance estimée en 2022 (2,1 %) ce qui prête à un semblant d’apaisement au regard du contexte difficile subi. Cela s’explique par un rebond du secteur primaire, avec une hausse du PIB agricole de 9 %, après -15,1 % en 2022. Revers de la médaille, le PIB non agricole devrait ralentir de 3,2 % en 2022 à 2,5 % cette année.
Selon le dernier rapport de la Banque mondiale (Responding to Supply Shocks ou Réagir aux chocs d’approvisionnement), après un fort rebond post-covid l’année dernière, l’économie marocaine a été exposée à une pression croissante en raison du chevauchement des chocs de la chaîne d’approvisionnement, de la vague de sécheresse et de la flambée des prix des matières premières qui ont alimenté l’inflation d’où ces projections.
Cela dit, la BM a indiqué que des risques baissiers persistent en raison des tensions géopolitiques, notamment la guerre en Ukraine, le ralentissement des principaux partenaires commerciaux du Maroc dans la zone euro et de nouveaux chocs climatiques potentiels. La BM a par ailleurs salué les efforts du gouvernement marocain qui a adopté une panoplie de mesures, qui prévoyait de fournir une subvention générale en matière de denrées alimentaires de base et de ne pas augmenter les prix des produits réglementés, ce qui a conduit à une stabilité partielle des prix des biens et services, qui représentent 25 % des dépenses moyennes des ménages.
La BM, dans son document, n’a pas omis de rappeler qu’en décembre dernier, Bank Al Maghrib (BAM) avait décidé de relever le taux d’intérêt de 50 points de base à 2,5 %, contre 2 % auparavant, pour tenter de freiner la forte inflation résultant des répercussions de la guerre en Ukraine et de la sécheresse.
Jesko Henchel, directeur Pays de la Banque mondiale pour le Maghreb et Malte, a déclaré dans un communiqué cité par le rapport que « les mesures prises récemment pour faire face aux chocs d’approvisionnement et préserver le pouvoir d’achat des familles marocaines ont considérablement atténué cet impact et empêché plus de personnes de tomber dans la pauvreté ». Hentchel a ajouté que « le lancement et la généralisation du système de subventions familiales, qui sera mis en œuvre au Maroc, contribueront à cibler efficacement les groupes de population les plus nécessiteux de manière équitable et rentable pour faire face à la forte augmentation des prix de cette ampleur ».
Cependant, l’Institution monétaire regrette que « malgré ces mesures, les familles les plus nécessiteuses sont les plus affectées par la hausse des prix alimentaires et autres dus à l’inflation ». Le Maroc a beaucoup souffert de la baisse des précipitations et surtout de la hausse des prix mondiaux des matières premières, ce qui a poussé le gouvernement à intervenir à plusieurs reprises pour les réduire pour atténuer l’impact des prix des denrées alimentaires et de l’énergie sur les ménages. Ces derniers ou du moins les plus modestes et vulnérables continuent de souffrir le plus de l’impact de la hausse des prix alimentaires et autres due à l’inflation (1/3 plus élevée pour les 10 % des plus pauvres de la population).
La BM a constaté qu’il existait une différence de prix des produits agricoles énorme entre la ferme et l’assiette et a estimé le fait injustifié. L’Institution a appelé l’Exécutif à mettre en œuvre des politiques structurelles pour y remédier et restreindre les « goulots d’étranglement sur les marchés alimentaires ». La publication du rapport intervient à un moment où les prix des légumes et des fruits au Maroc ont augmenté de façon spectaculaire. Cela avait suscité de vives polémiques sur le phénomène de la multitude d’intermédiaires et spéculateurs entre l’agriculteur et le consommateur final. Selon le Haut-Commissariat au Plan, le taux d’inflation pour l’année 2022 était d’environ 6,6 %, le chiffre le plus élevé enregistré au Maroc depuis trois décennies.